Contre toute attente, les taux immobiliers baissent doucement mais sûrement depuis plusieurs mois. Ils retrouvent maintenant leur niveau de l’hiver 2016-2017 ! Faut-il en profiter pour racheter son crédit voire pour changer d’assurance emprunteur ?
Une lente érosion. S’il y a bien eu un léger rebond au premier semestre 2017, depuis, les taux de crédit immobilier ne dévient plus de leur chemin en pente douce. Les prêts sur 20 ans se négocient aujourd’hui autour de 1,60% ou 1,65%, un niveau comparable à celui de décembre 2016. D’où l’indémodable question, revenant à chaque baisse de taux : faut-il renégocier son crédit immobilier ?
« L’effet taux bas perdurant, les demandes de renégociation de crédits affluent de nouveau », affirme ainsi Maël Bernier, directrice de la communication de Meilleurtaux. Mais Sandrine Allonier, directrice des relations banques de VousFinancer, tempère : « Nous ne sommes pas au niveau de ce que nous avons connu en 2016 car beaucoup d’opérations ont déjà été effectuées… » La Banque de France a enregistré un pic en janvier 2017 : les renégociations et rachats représentaient plus de 60% des dossiers de crédit immobilier. Tombée à 15% fin 2017, la part des renégociations dans la production de prêts à l’habitat vient de repasser au-dessus des 20%. Un frémissement.
Obtenir un taux inférieur de près d’un point
A moyen terme, tous les observateurs prédisent une remontée progressive – quoique lente, là encore – des taux. La fenêtre s’ouvre donc effectivement en ce printemps 2018 pour une ultime renégociation, ou pour racheter un crédit souscrit voici 1 ou 2 ans seulement.
« Beaucoup de renégociations ont déjà été effectuées »
A une autre époque, la renégociation reposait sur un règle intangible : les taux pratiqués devaient être inférieurs d’un point minimum au taux du crédit en cours. En cette période de taux bas, la règle est assouplie. Meilleurtaux évoque une règle des « 0,70 point ». Jauffrey Ianszen, directeur réseaux et développement d’Immoprêt, estime lui qu’avec « un écart de 0,80 point » des emprunteurs peuvent « s’y retrouver ». Bref, pour se pencher sur le sujet, il faut que les taux envisageables soient situés au moins dans une fourchette de 0,70 à 1 point d’écart avec le taux initial.
Plus concrètement, à la vue des faibles évolutions des taux depuis plusieurs trimestres, seuls les emprunteurs ayant souscrit un crédit ou renégocié fin 2015-début 2016, ou précédemment, doivent se pencher sur le sujet. Pour les autres, ceux qui ont conclu leur prêt plus récemment, l’écart de taux risque d’être trop faible.
Les coûts : pénalités, nouvelle garantie…
Pourquoi faut-il nécessairement un écart de taux conséquent ? Car le rachat de crédit immobilier par un autre établissement engendre plusieurs coûts : les indemnités de remboursement anticipé (IRA), de nouveaux frais de garantie, et les nouveaux frais de dossier ou frais de courtage.
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Tous ces coûts sont évidemment fluctuants d’un dossier à un autre. Dans le cas du cautionnement, les nouveaux frais de garantie sont en partie couverts par la restitution partielle de la première caution. En cas d’Hypothèque, les frais additionnels seront plus importants. Par ailleurs, pour les crédits récents, avec des taux peu élevés, les IRA sont eux-mêmes limités car ils ne peuvent pas dépasser 6 mois d’intérêt sur le capital remboursé. Dans tous les cas, le gain de la baisse de taux doit être suffisamment conséquent pour compenser l’ensemble de ces coûts.
2016. Brice et Camille, 28 ans chacun, disposent tous deux de 2 000 euros de revenus mensuels. Pour financier un bien d’une valeur de 250 000 euros, ils négocient un emprunt de 200 000 euros sur 20 ans à 2,25%. Et optent pour l’assurance emprunteur proposée par la banque (taux de 0,276%).
- Mensualité, à partir de mai 2016 : 1 126 euros.
- Coût total du crédit, avec assurance : 70 147 euros.
2018. Camille et Brice font racheter leur crédit par une autre banque. Le capital restant dû est de 184 500 euros, auxquels il faut ajouter 2 100 euros d’IRA et 2 200 euros de caution au nouveau financement. En conservant des mensualités équivalentes, ce couple raccourcit d’un an son crédit : il obtient un prêt à 1,55% sur 17 ans.
- Mensualité : 1 134 euros.
- Coût total du nouveau crédit : 43 235 euros, soit plus de 16 100 euros d’économies par rapport au crédit initial.
Exemples réalisés par Immoprêt
Adoucir ses mensualités
Si vous remboursez un crédit depuis plus de 2 ans, un rachat peut ainsi vous permettre de réduire nettement la durée de prêt, et ainsi d’espérer un taux nettement plus avantageux : « Des emprunteurs ayant initialement opté pour un prêt sur 25 ans peut se retrouver dans une situation ayant évolué », développe Jauffrey Ianszen, d’Immoprêt. « Il leur reste un peu moins de 23 ans de crédit : ils peuvent viser un prêt sur 20 ans en modulant leurs mensualités. La grille de taux ne sera pas la même. »
Les emprunteurs peuvent aussi profiter de la renégociation pour adoucir des mensualités fixées initialement au plus proche de leur taux d’endettement maximal, généralement situé à 33% des revenus.
Le couple d’emprunteurs cherche cette fois à abaisser ses échéances mensuelles. En conservant une période de remboursement de 18 ans, ils obtiennent un financement à 1,60% :
- Mensualité : 1 087 euros, soit 39 euros en moins à rembourser chaque mois.
- Coût total du nouveau crédit : 46 768 euros, soit près de 12 600 euros d’économies par rapport au crédit initial.
En profiter pour changer d’assurance emprunteur
Le rachat de crédit s’accompagne souvent d’un changement d’assurance emprunteur : en cette période de taux bas, les économies ainsi réalisées sur l’assurance de prêt sont parfois aussi importantes que les économies réalisées sur les intérêts d’emprunt. Mais attention : l’optimisation de l’assurance emprunteur implique le plus souvent le basculement d’une assurance de groupe vers une assurance déléguée, avec un fonctionnement distinct. Cette assurance proposée par des assureurs autres que la banque prêteuse est individualisée : le tarif varie selon l’âge de l’emprunteur, plusieurs critères de santé, sa profession, etc. Et la cotisation est calculée en fonction du capital restant dû : elle peut ainsi être plus élevée que la cotisation intiale au départ mais diminue ensuite au fil des remboursements.
Brice et Camille, qui ont désormais 30 ans, sont non fumeurs, n’ont pas de travail à risque et font moins de 20 000 km par an. Ils peuvent espérer une assurance déléguée au taux de 0,12%. En restant dans une logique de réduction des mensualités (nouveau crédit de 18 ans), ils gagnent cette fois près de 100 euros chaque mois par rapport à leurs échéances initiales :
- Mensualité de mai 2018 : 1 040 euros (1 039 euros à la fin de l’année).
- Coût total du nouveau crédit : 32 768 euros, soit près de 26 600 euros d’économies par rapport au crédit initial.
Et un simple réaménagement de crédit ?
Le fait de se lancer dans une renégociation de crédit peut aussi vous permettre de faire réagir votre banque. Afin d’éviter que vous ne rejoigniez la concurrence, celle-ci pourrait vous proposer un aménagement de crédit, ce qui se matérialise par un Avenant au contrat de prêt initial. Dans ce cas, pas de pénalités de remboursement anticipé, ni de frais de garantie ! La règle de 0,70 ou 1 point d’écart n’a donc plus lieu d’être.
En 2015-2016, certaines banques acceptaient facilement ces aménagements de crédit. Et aujourd’hui ? cBanque a sollicité plusieurs banques sur le sujet mais aucune n’a donné suite. « Elles sont en retard sur leurs objectifs de conquête de clientèle », souligne Jauffrey Ianszen. « Elles vont donc se montrer très sensibles au fait de garder leurs clients actuels. » Autrement dit, mises en concurrence, les banques pourraient facilement proposer une contre-offre aux clients tentés par la renégociation.
Source: cbanque.com